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No-fly zone over Mountchicken

Publié le par Prince Bernard

Principauté de Montpoulet,

Montpoulet, Chemin de Montpoulet, etc.

 

Prince Bernard-Régis, Commandeur de l’ordre de la Salamandre Écarlate, Chevalier Servant de la Bicyclette et des  Palmes Académiques.

Cabinet du Prince le 11 décembre, an 16 de l’Agirvitébien.

 

à

 

Monsieur le Général de Brigade Aérienne Éric AXXXXXX, commandant la  Base Aérienne, 701 de Salon de Provence, Chemin Saint Jean, 13661 Salon de Provence

 
 
 

Voilà bientôt vingt ans que nous habitons la Principauté. À notre arrivée en provenance d’un village près de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, nous nous sommes de suite étonnés d’entendre les avions beaucoup plus que là-bas. Nous avons donc décidé d’interdire le survol aux trop bruyants d’entre eux. La pancarte fut placée face au ciel dans un endroit dégagé non recouvert de végétation.

 
Cela n’a strictement rien changé. On nous a dit que comme nous étions sur un point géodésique, vos pilotes le prenaient pour repère. On nous a même dit que certains, plus malins que les autres, avaient fait le pari de se glisser entre nos deux corps de bâtiments.

Nous reconnaissons que la pancarte est petite mais les trois pastilles de bronze du point géodésique, enchâssées dans les rochers, ne font pas plus de deux cm de diamètre et les pilotes s’en servent bien… mais voilà pourquoi je vous écris. Je précise que si les aéronefs dépassant les 50 km/h sont indésirables (nous n’avons rien contre les Montgolfières qui, malgré la sorte de rugissement qu’elles émettent lorsque le brûleur est en marche, restent compatibles avec notre sérénissime domaine) nous n’aurions rien, réflexion faite, contre un aéronef plus rapide mais dont le moteur serait silencieux. On rend bien les pistolets silencieux, pourquoi pas les Mirages et les  Rafales ?

Rien de tel, vous en conviendrez, que le tonnerre d’un avion chasse, tellement soudain, tellement démesuré,  pour nous faire perdre la raison. Puisqu'il nous en reste encore un peu, nous vous serions reconnaissants de l’épargner.

 

Je vous prie d'agréer, mon général, l'expression de ma sereine et respectueuse considération.

No-fly zone over Mountchicken

Général de Brigade Aérienne Éric AXXX, Officier de la Légion d’Honneur, Base Aérienne 701 de Salon de Provence, Chemin Saint Jean, 13661 Salon de Provence.

À

Prince de Montpoulet, Montpoulet, Chemin de Montpoulet, etc.

 
Monseigneur,

Votre courrier a retenu toute notre attention et, soucieux de ne pas assombrir les relations de voisinage avec votre excellence, nous avons demandé à nos pilotes, lorsqu’ils sont en approche de Montpoulet, de couper leurs réacteurs pendant le dernier kilomètre, afin de survoler la Principauté en vol plané et de ne remettre les gaz qu’une fois la crête de montagne dépassée. Cela ne supprimera pas toutes les nuisances, nous en sommes conscients, mais vous comprendrez aisément qu’un survol plus long sans réacteur pourrait avoir des conséquences fâcheuses pour les mitrons des cheminées de vos palais.

N’hésitez pas à nous faire part de vos remarques à ce sujet. Nos services sont tout entiers à votre écoute.

Je vous prie d'agréer... etc.

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L'agrégation des minces langues occidentales

Publié le par Prince Bernard

J’ai la réponse à la question que je posais il y a quinze jours : non, le réduve masqué n’est pas l’allié du calosome sycophante dans sa lutte contre les chenilles processionnaires du pin ; non, il n’en est pas non plus l’éboueur. (Au fait, l'imago des processionnaires est un papillon de nuit sans trompe, sans goût ni couleur, qui vit quelques jours seulement sans se nourrir. Il fait partie de la famille des notodontes, ce qui doit signifier, puisque mastodonte veut dire dents en forme de sein, qu'il a, à défaut de trompe, des dents en forme de dos, CQFD. Son petit nom est thaumetopoea pityocampa, ce qui signifie, quand on comprend le grec, ce qui n'est pas mon cas, faiseur de merveilles et campeur qui fait pitié. Je plaisante. Et je lance un appel aux hellénistes).

 

Non, ce que j’ai trouvé dans le cocon de chenilles processionnaires, en train de se régaler, non pas des chenilles mais de petites billes de je ne sais quoi, mais qui ressemble à de la résine de pin, c’est en réalité le réduve américain, ou la punaise du pin, justement. Un invasif, une sorte de migrant, un sans-papier, qui ne figure donc pas dans mon livre (réputé) sur les insectes européens. D’où mon erreur. Et cette punaise n’est pas carnivore (insectivore, plus précisément) mais végétarienne, comme les Américains à la mode. Elle n’a pas de rostre avec lequel elle risque bien de vous piquer pour vous inoculer on ne sait quoi encore, mais une sorte de trompe très allongée et souple, d'où son petit nom Leptoglossus Occidentalis, encore du grec : langue mince d'occident.

 

Si l'on ne trouvait de ces punaises américaines que dans les nids de chenilles ou à la rigueur dans les pins, tout irait bien, mais comme sa cousine migrante la coccinelle chinoise, dont je vous dirai deux mots tantôt, elles ont tendance, quand la bise fut venue, à se réfugier dans les maisons. Et quand l'une d'entre elle a trouvé son squat confortable, elle émet des phéromones très particulières, dites d'agrégation, oui, comme le concours des enseignants, et on assiste à un regroupement familial massif. Montpoulet en sait quelque chose, nous en trouvons cinq par jour.

 
L'agrégation des minces langues occidentales
L'agrégation des minces langues occidentales
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La source miraculeuse de Montpoulet

Publié le par Prince Bernard

Après 100 mm de pluie en cinq jours, elle est à son maximum, presque 10 m3 par jour :

La source miraculeuse de Montpoulet

Comment le sais-je ? Parce que je mesure le débit à l'aide d'un mug d'environ 30 cl (je devrais dire « half pint » dans la perspective de l'admission de Montpoulet au sein du Commonwealth).

La source miraculeuse de Montpoulet

Et le nombre de secondes qu'il est nécessaire à la source pour remplir la mesure me permet, grâce à une sorte de Pierre de Rosette opportunément placée à proximité, de trouver le débit (oui, encore en litres, mais je prévois une autre pierre gravée pour convertir en quarts et gallons).

 

La source miraculeuse de Montpoulet

L'information ne serait pas complète sans le débit de septembre : autour de 300 litres/jour.  Comme cela suffit à peine pour les douches, les chasses et les lessives, boire du vin devient impératif et c'est alors que la source fait des miracles.

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Le réduve masqué est-il l’allié du calosome sycophante, (non, c'est un carabe espagnol !) ou son éboueur ?

Publié le par Prince Bernard

Le sycophante est un prédateur de la chenille processionnaire. C’est un coléoptère étonnant, d’abord on dirait qu’il a opté pour une carrosserie multicolore métallisée...

Le réduve masqué est-il l’allié du calosome sycophante, (non, c'est un carabe espagnol !) ou son éboueur ?

...et ensuite parce que son surnom se traduit du grec par « délateur des voleurs de figues ». Ne me demandez pas pourquoi, cela prendrait des heures pour répondre. J’ajouterai juste que ce surnom a donné en anglais l’adjectif sycophantic (flagorneur). On le dit rare parce qu'on ne laisse plus les arbres pourrir dans les forêts. Il est courant à Montpoulet.

Le réduve masqué est une grosse punaise, à l’odeur de citron très forte, qui nous dit-on, débarrasse les vieilles maisons des mites, mouches, araignées et punaises de lit.

Le réduve masqué est-il l’allié du calosome sycophante, (non, c'est un carabe espagnol !) ou son éboueur ?

Alors pourquoi en ai-je trouvés dans un cocon de chenilles processionnaires tombé d’un pin parasol ? Finissaient-ils les restes d'un calosome sycophante ou étaient-ils venus lui prêter main forte pour exterminer la colonie de chenilles ?

Je pose la question.

 

Je donne la réponse tout de suite (quoiqu'en réalité plusieurs années plus tard) pour éviter la diffusion de contrevérités (et grâce au commentaire ci-dessous) : il ne s'agit ici di d'un « calosome sycophante », ni d'un « réduve masqué » !!!

Le réduve masqué est-il l’allié du calosome sycophante, (non, c'est un carabe espagnol !) ou son éboueur ?
Le réduve masqué est-il l’allié du calosome sycophante, (non, c'est un carabe espagnol !) ou son éboueur ?

Publié dans Faune pouletmontoise

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Pourquoi la vierge noire de Navas est-elle blanche ?

Publié le par Prince Bernard

Non loin de la Principauté de Montpoulet, un lieu de pèlerinage qui date du Xè siècle...

 

      Nous avons un jour organisé pour des amis lyonnais une randonnée qui allait de Navas à St Romain d’Ay et l'avions intitulée « D’une vierge noire à l’autre ». Mais dans la chapelle de Navas la vierge était blanche, alors que quelques heures plus tard, nous trouvions bien une vierge noire dans la chapelle de Notre Dame d’Ay. La longue mais agréable marche depuis quasiment la vallée de la Daronne, jusqu’à la vallée de l’Ay, posait donc deux questions : A- que sont les vierges noires ? et B- celle de Navas en est-elle une ? Je vais tenter de répondre aux deux.

Notre Dame de Navas et Notre Dame d'Ay.Notre Dame de Navas et Notre Dame d'Ay.

Notre Dame de Navas et Notre Dame d'Ay.

     A- De nombreuses théories sont avancées par les historiens, ou pseudo-historiens, pour expliquer la noirceur de ces vierges, presque toutes situées en France : entre 120 selon Émile Saillens en 1933 et 272 selon Marie Durand Lefèvre en 1937, pour seulement quelques dizaines pour tout le reste de l’Europe et le Mexique.

 

     1- Une première hypothèse est qu’elles ont été colorées par la fumée des cierges. Certes, ces vierges étaient exposées à beaucoup de fumée. Celle du Puy l’était à 64 lampes en permanence mais comment expliquer que toutes les vierges n’aient pas été noircies (alors qu’on leur brûle toutes des cierges) et comment expliquer ces vierges déjà noires à leur découverte en terre comme le rapportent souvent les légendes1 .

     

Une variante est qu’elles aient été colorées volontairement. C'est une théorie du XVIIIè siècle pour contrer l’idée qu’il pourrait s’agir de déesses blanches héritées des Romains ou des Grecs, voire, comme pour Notre-Dame de Moulins, pour aider à la conversion des Maures, de façon qu’ils reconnaissent en la Vierge une femme de leur race, une théorie bien tirée par les cheveux. Colorées volontairement ou pas : une théorie scientifique explique que la céruse, coloris blanc utilisé au Moyen Âge, contenant du carbonate de plomb, donne au contact de l’air du sulfure de plomb qui est noir. Mais si c’était le cas, tous les personnages cérusés seraient maintenant noirs, ce qui n’est pas le cas 2.

     

Colorées, enfin, pour satisfaire à une mode : certains suggèrent que devant le succès de certaines vierges noires (les pèlerinages apportent la prospérité là où ils aboutissent), l’on ait volontairement coloré certaines, comme à Marsat, à Clermont-Ferrand ou à Brioude. Dans le même but d’attirer des pèlerins, il y a certainement eu des évolutions inverses, des statues noires qui ont été blanchies et dorées comme à Tournus, Avith et Chappes  3. Cependant c’est sans doute la première hypothèse sérieuse que nous rencontrons, si l’on prend bien soin de ne pas la généraliser.

1Thierry Wirth, Les Vierges noires, Oxus 2009, page 50.

2Idem p.48.

3Jean-Pierre Bayard, Déesses mères et Vierges noires, Éditions du Rocher 2001, p.77.

Notre Dame de Moulins.

Notre Dame de Moulins.

     2- Un deuxième groupe d'hypothèses est que la couleur est due à la matière dont elles sont faites. Que ce soit le bois et ce serait par exemple le cas de la statue d’Artémis à Éphèse, en bois de vigne ou de cyprès et qui serait devenue noire à force d’avoir été huilée1. Que ce soit une météorite ou un aérolithe : d’après Thierry Wirth, une bombe volcanique prend spontanément, par sa fusion en haute atmosphère, une forme conique et boursouflée qui évoque une femme présentant son enfant.

L’hypothèse la plus farfelue se situe dans cette catégorie. Elle est rapportée par Jacques Bonvin2 : elles seraient chargées d’énergie tellurique, ce qui expliquerait à la fois leur couleur et leurs miracles. Cette théorie est reprise par Daniel Castille3 qui invoque la pseudo-science de la géobiologie pour soutenir que la terre est parcourue par un réseau d’ondes dont les nœuds énergétiques correspondraient à des points d’eau, donc à des lieux sacrés, donc à des vierges noires. Jacques Bonvin publie une photo prise de la Vierge d’Orcival, en Auvergne, en 1979. Le développement fit apparaître des zébrures de lumière émanant de la vierge, une bien opportune « preuve » d’énergie. Un ufologue fit remarquer que cela ressemblait aux décrochements de certains ovnis qui atterrissent suivant la technique dite « de la feuille morte ». Si l’on cherchait encore un lien entre apparition d’ovnis et apparition de vierges, en voici donc un de particulièrement croquignolet. Ce genre de théorie illustre l’attrait de la question pour les marchands de merveilleux, de mystères et d’explications irrationnelles, qui malheureusement pullulent pour vendre leur prose et obscurcir le champ de vision d’un observateur honnête.

1Wirth, ibidem p.74

2Jacques Bonvin, Vierges Noires La réponse vient de la terre Éditions Dervy 1988.

3Daniel Castille, Le Mystères des Vierges Noires, JMG Éditions 2001.

Notre Dame d'Orcival en bois de noyer.

Notre Dame d'Orcival en bois de noyer.

     3- Une troisième hypothèse est qu’il s’agirait de vierges rapportées des croisades : comme Notre Dame d’Ay « rapportée par les croisés en 1200 » selon René Saint Alban1. Rapportée donc de Palestine ou de Constantinople, pas d’Afrique Noire ! Cependant le docteur Paul Olivier (L’ancienne statue romane de Notre Dame du Puy, 1921) nous apprend que la vierge du Puy fut conduite au bûcher pendant la Révolution aux cris de « Á mort l’Égyptienne »2, ce qui laisse croire que son visage avait un aspect au moins oriental, ou que la noirceur passait pour un teint hâlé. De même le jésuite Van Steen (1556-1637) en donne pour preuve que l’icône de Sainte-Marie-Majeure de Rome, attribuée à Saint Luc, a un visage noir3. Il en est ainsi de plusieurs icônes exécutées sur bois et dont « le teint très brun ou même noir, est sans doute accentué par la technique de l’encaustique4 ». Une hypothèse coupe cependant la poire en deux : la vierge aurait été fabriquée sur la commande précise d’un croisé de retour, avec un visage oriental, yeux en amandes, teint foncé, comme une sorte de souvenir, suite à un vœu formulé là-bas.

     La plupart de ces vierges noires, n’oublions pas, sont des copies d’ originales que les accidents de l’histoire ont détruites. Ce qui pourrait expliquer qu’une vierge noire, attestée par la tradition comme à Navas, ait été remplacée par une blanche, pour des raisons inconnues.

 

1René Saint-Alban, Guide de l'Ardèche Insolite, Éditions de la Bouquinerie, 1993.

2Témoignage cité par tous les auteurs.

3Wirth, ibidem p. 64.

4JP Bayard, ibidem p. 56.

Notre Dame du Puy (l'ancienne, et l'actuelle, photo Nicolas Debray).
Notre Dame du Puy (l'ancienne, et l'actuelle, photo Nicolas Debray).

Notre Dame du Puy (l'ancienne, et l'actuelle, photo Nicolas Debray).

     4- Laissons donc ces précédentes hypothèses pour examiner celle qui est partagée par le plus grand nombre d’auteurs : une survivance de déesses-mères pré-chrétiennes.

     

      René Saint Alban voit à Notre Dame d’Ay une survivance du culte celtique à Maïa. François Graveline (Vierges Romanes) énonce que « Marie est, pour partie, la réincarnation de la Belisama celte, comme des Minerve ou des Cérès romaines, de la Perséphone grecque, ou de l’Isis égyptienne, elles-mêmes descendantes lointaines des Vénus préhistoriques ». Une filiation illustrée par les exvotos romains trouvés dans la Source des Roches à Chamalières non loin de la vierge noire de Notre-Dame-du-Port. On pourrait ajouter l'anatolienne Cybèle, déesse de la fécondité, noire sous son manteau vert chez les Phrygiens d’Asie Mineure, qui se partageait avec Isis la protection des empereurs romains.

     Toutes déesses qu’on appelait vierges mais pas dans le sens anatomique comme de nos jours. Un mouvement qui s’appelle les Matriciens1 y voit ainsi une survivance de déesses pré-chrétiennes qui auraient été non pas des vierges au sens commun mais des femmes sexuellement indépendantes, ce qui est expliqué par l’étymologie, d’après Tristan Mandon2 : le latin virgo ayant remplacé le grec parthenos : mère non mariée (voyez la même racine dans parthénogenèse). Toutes ces déesses auraient eu des représentations noires.

     Et finalement il n’y a guère d’auteurs qui ne finissent pas par invoquer l’Égyptienne Isis et, après examen, on n'est pas étonné. On dirait même que Isis a servi de modèle pour celle que les Catholiques ont mis tellement de temps à diviniser, au grand dam d’autres églises chrétiennes comme les protestantes. Comme Marie, Isis a un fils sans être mariée, ou plus exactement sans intervention mâle puisque son mari vient d’être assassiné. Elle aurait été fécondée par le feu divin. Elle est presque toujours, en outre, représentée avec son fils Horus sur les genoux et ce serait elle qu’on aurait adorée sous les noms de Cybèle, déesse de la fécondité (noire sous son manteau vert chez les Phrygiens d’Asie Mineure), de Cérès ou même de Diane chez les Romains3.

     La vierge noire du Puy est en la matière la plus riche d’enseignement : elle a été décrite avant sa destruction, par Faujas de Saint Fond qui nous apprend que ses yeux notamment n’étaient pas sculptés mais des enchâssements de lentilles convexes, une technique courante dans les statuettes de l’antiquité, qui laissait passer la couleur de la cavité et devaient, dans la pénombre, beaucoup impressionner les croyants.

     Enfin, selon les Matriciens, la vierge noire du Puy avait l’aspect d’une momie ; les bandelettes qui enveloppaient son corps ainsi que celui de son fils ne laissaient voir que leur visage. Et lorsque on l’a brûlée pendant la révolution, un papyrus est sorti d’une cavité creusée dans son dos, mais qu’on n’a pas pu sauver. Par contre une pierre ovale portant des inscriptions égyptiennes a été retrouvée dans les cendres qu’on avait éparpillées dans les champs pour qu’elles ne servent pas de reliques.4

     Pour conclure sur cet aspect, rappelons que personne ne prétend que l’on ait continué à adorer ces déesses pré-chrétiennes, mais simplement qu’on les a remplacées par la Vierge, aux mêmes endroits, avec souvent les mêmes attributs et les mêmes pouvoirs. On peut évoquer à cet égard comme une coïncidence de dates : les vierges noires dateraient toutes au plus tôt du X° siècle, or Marie, déclarée Mère de Dieu au Concile d’Éphèse en 431 n’est que progressivement ensuite parée des atours de la virginité perpétuelle qui font d’elle l’égale d’une déesse5. Et plutôt que de chercher une théorie qui les expliquât toutes il faut admettre humblement que toutes les hypothèses ont certainement leurs démonstrations et preuves particulières. Á chaque vierge noire sa propre explication, sans doute. Mais qu’en est-il de celle de Navas ?

 

1http://matricien.org

2 Http://racines.traditions.free.fr

3Wirth, ibidem p. 56 & 72.

4 Jean Peyrard, Histoire secrète de l’Auvergne, Albin Michel 1995, p.279.

5 JP Bayard ibidem p.42.

L'artémis d'Éphèse (photo Wikipédia)

L'artémis d'Éphèse (photo Wikipédia)

     B - Wikipedia, l’Encyclopédie en ligne nous dit qu’ « À Saint-Victor, Ardèche, on vient en pèlerinage auprès de la vierge noire de la Chapelle Notre-Dame de Navas (XIè siècle) ». René Saint Alban signale simplement qu’à Naves (l’orthographe varie, souvent Navaz) « Notre Dame de la Délivrance est implorée pour de bonne couches » et que pour ce faire les femmes doivent poser leur pied nu sur une pierre à empreinte appelé Pas de Notre Dame situé à plusieurs centaines de mètres de la chapelle.1

     Cependant, Jean-Pierre Bayard, dans son Répertoire des Vierges Noires par département, pas plus que son maître Jacques Boivin, n’en fait mention et précise bien qu’il n’y a pas de vierge noire à Tournon, alors qu’elles sont incontestables en Andance, à Cornas et St Romain d’Ay pour ne citer que celles du Haut Vivarais.

     Nous terminerons par la mention qui est faite dans la plaquette Croix et petit patrimoine2 : « 1882. Extrait des archives paroissiales. “ La vierge au dessus du tabernacle, statue de modique grandeur en bois noir, d’une sculpture admirable. La tradition la plus accréditée porte à croire que cette image précieuse d’une origine très ancienne nous était venue de la Palestine, léguée à ce sanctuaire par un pieux chevalier des croisades à son retour de la Terre Sainte”. Immédiatement suivi d’un autre extrait contradictoire : “Vierge debout avec l’enfant, bois polychrome blanchi. Hauteur 0,47 m. Source ayant le pouvoir de guérison des maladies des yeux.” » Doit-on en conclure que la vierge de Navas est une vierge noire qui aurait été blanchie ? Il faudra bien en rester sur ce questionnement.

 

1Saint-Alban, ouvrage cité.

2 Association Chantelermuze, 07410 Saint-Victor dont dépend Navas, 2006.

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Être ou avoir ? Non ! Avoir une —vraie— cave à vin !

Publié le par Prince Bernard

Deux devoirs de vacances cette année, quel est celui qui est en vraie pierre sèches (sans mortier ni béton), celui de la cave à vin (n°1) ou celui de l'abri voitures (n°2) ?

 

Être ou avoir ? Non ! Avoir une —vraie— cave à vin !
Être ou avoir ? Non ! Avoir une —vraie— cave à vin !

Ce n'est pas évident mais en cherchant bien, on distingue quelques taches blanches entre les pierres du n° 2. C'est bien du ciment. Il s'agissait d'un mur qui, classiquement, parce que les anciens, pour bâtir ces murs de soutènement de terrasses, ne construisaient qu'un parement... il s'agissait d'un mur qui « faisait le ventre ». Ainsi, Françoise ne pouvait pas enfoncer sa voiture au fond de l'abri. Pour corriger, j'ai pris le risque de rebâtir en retrait de 20 cm puis, vers le haut, en encorbellement pour rattraper l'à-plomb. Le risque est compensé par un calage de béton, derrière le parement, quasi invisible.

Pour la cave à vin, creusée dans l'argile compactée par les millénaires, peu de risque. Donc de la vraie pierre sèche, là où les erreurs d'appareillage ne pardonnent pas. Ce mur du fond, qui laisse libre sur la droite un passage vers le futur tunnel qui rejoindra celui pour Londres, j'y reviendrai, n'était qu'un des travaux de finition qui attendaient dans cette cave depuis des années.

 

Un certain Platon, à ce que me dit un ami qui l’a bien connu, prétendait que les dieux avaient donné le vin aux hommes pour adoucir leur douloureuse existence. Rabelais que l’appétit vient en mangeant, et la soif disparaît en buvant.

Il me fallait donc enfin recouvrir, de citations gravées dans le béton, le trou d’homme qui, à l’entrée de la cave, permettrait en cas d’urgence de se glisser dans le réservoir d’eau de pluie que j’ai creusé en dessous de la terrasse. Un réservoir que j'avais prévu faire communiquer, par un tunnel noyé, avec la piscine. Son trou d'homme aussi nécessitait couvercle, ci-après encore tout frais.

 
Être ou avoir ? Non ! Avoir une —vraie— cave à vin !
Être ou avoir ? Non ! Avoir une —vraie— cave à vin !Être ou avoir ? Non ! Avoir une —vraie— cave à vin !

Il existe sans doute mieux garnie comme cave à vin, mais celle de Montpoulet comprend cette vipère aspic (un mâle, ce qui ne fait aucun doute à l'examen, il a deux pénis, comme les requins, pratiquant sans doute le ménage à trois) conservée dans la gnôle et qui est promise à un long vieillissement : on ne risque pas de boire la gnôle, elle a pris le goût du cadavre, et il n'est pas exquis ! 

Côté blancs et mousseux, côtés Côtes du Rhône et côté vipère.Côté blancs et mousseux, côtés Côtes du Rhône et côté vipère.
Côté blancs et mousseux, côtés Côtes du Rhône et côté vipère.

Côté blancs et mousseux, côtés Côtes du Rhône et côté vipère.

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La nature fait-elle bien les choses et les médecins connaissent-ils la réponse ?

Publié le par Prince Bernard

La nature fait-elle bien les choses et les médecins connaissent-ils la réponse ?

Année de foin année de rien, dit ma mère.

Juste après avoir posé mon pied gauche sur l’herbe sèche que je venais de couper, je me suis affallé brutalement. C’est extrèmement glissant l’herbe sèche, je me souviens d’un été où pour aller mettre en route la pompe en bas de la pente, je descendais en luge. Je me suis affallé brutalement sur le côté droit et la convexité de mon grill costal s’est écrasée sur celle du bloc moteur de ma débroussailleuse ; « grill costal », c’est comme ça qu’ils vont dire à l’hôpital. Je me demande ce qu’on peut y faire griller. Des côtelettes, sans doute. Souffle coupé, j’ai tout juste pensé à couper le contact. Douleur intense, j’ai repensé au précédent écrasement de grill costal. Il s’était soldé par un pneumo-thorax. Aussi j’attends que la douleur s’atténue avant de reprendre le travail. Le dimanche, je rentre aussi trois remorques de bois sans trop souffrir. Mais le lundi matin, après trois autres remorques, la douleur est telle que j’ai de la peine à descendre du tracteur. Je me dis alors que y’a certainement quelque chose de cassé et puisque cela me fait bien plus mal que l’autre fois, qu’il n’y en a pas qu’une de cassée, de côte. J’appelle mon médecin qui me dit d’aller directement aux urgences. J’ai de la peine à entrer dans la voiture et le moindre soubresaut m’arrache un gémissement.

Les urgences sont un jeu de piste. Une partie de l’hôpital a brûlé et des flèches indiquent un nouvel emplacement. Je me perds un peu, me méprend sur le sens des nombreux placards et me retrouve à faire la queue en médecine. Puis enfin aux urgences où une secrétaire me fabrique un joli bracelet avec mes nom, prénom et date de naissance, au cas où je serai pris d’amnésie subite, ainsi qu’un très impressionnant code barre dont je suppose qu’il contient tout mon dossier médical. C’est ce que je crois encore quand la blonde urgentiste lit sur son écran que je suis venu l'an dernier me faire coudre une entaille de tronçonneuse. « Oui, je suis très maladroit », je confirme. Mais le code barre n’est qu’un numéro (« Je ne suis pas un numéro ! Qui est le numéro Un ?»)

 

La nature fait-elle bien les choses et les médecins connaissent-ils la réponse ?

Elle a l’air surprise que je sois venu par mes propres moyens. « Il y en a qui n’hésitent pas à appeler les pompiers pour une blessure à la main », explique-t-elle.

Elle m’ausculte avec les mains, me fait un mal de chien en m’appuyant sur le ventre, bizarrement, et puis avec un échographe même sous la ceinture de mon pantalon qu’elle défait elle-même (!). Et puis on vient me chercher pour la radio alors qu’elle m’a engagé dans un débat sans fin sur le niveau qui baisse en français dans la génération de ses enfants.

 

Finalement rien n’est cassé. La nature n’est donc pas bien faite puisque une côte cassée fait moins mal que rien de cassé. « Mais je vous interdis tout effort », me dit-elle avec un sourire malicieux comme si elle savait que je n'obéirais pas. Elle m’explique que même sans fracture, les ligaments, tendons, et vaisseaux sanguins ont franchement été dérangés par la convexité du bloc moteur. « Et je vous ai fait une ordonnance qui comprend un anti-douleur, un décontractant musculaire et un anti-inflammatoire ».

Il n’y a pourtant, je pense, que la douleur pour m’empêcher de reprendre le débroussaillage… C’est donc qu’elle, docteur en médecine, ne pense pas que la nature soit bien faite.

La nature fait-elle bien les choses et les médecins connaissent-ils la réponse ?
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Maurice-Jean Calvet, un Saint-Victorien d'envergure

Publié le par Prince Bernard

La principauté de Montpoulet est enclavée dans la commune de Saint-Victor en Ardèche avec laquelle nous entretenons de cordiales relations. Si cordiales que nous commençons ici une série d'hommages à ses composantes, tant personnelles que monumentales.

Maurice-Jean Calvet, un Saint-Victorien d'envergure

Au village, on l’appelait l’ambassadeur. Il ne l’était pas. On disait aussi qu’il avait été pilote de chasse. Il ne l'avait jamais été. Il habitait cette grande maison aux façades claires qui domine le village et où l’on est accueilli par une citation de Virgile : carpent tua poma nepotes ( tes neveux cueilleront tes fruits).

Á Chantelermuze, nous le connaissions linguiste puisque l'association est en possession de son mémoire de maîtrise consacré au patois de Saint-Victor et qui recense pratiquement tout le lexique de ce parler qu'on classait alors dans la famille du provençal. Plus austère pour le néophyte, peut également se feuilleter un mémoire de DESS (*) , préambule à un doctorat, et consacré à la phonologie du même patois que l'auteur considère comme un des mieux conservés et des plus authentiques de la région. On apprend dans ces mémoires que la mère de l'auteur est originaire de Saint-Victor.

Mais il y avait effectivement un peu de l’ambassadeur et du pilote de chasse chez Maurice-Jean Calvet, un petit livre vient préciser ces deux réputations : Échec au Putsch, publié , vraisemblablement par son auteur, en 1970. Les rabats de la couverture nous apprennent qu’après un doctorat ès Lettres, il a mené une carrière universitaire jusqu’à devenir directeur du Centre de Linguistique Appliquée de Dakar où il se consacra à la « décolonisation de l’enseignement du français en Afrique ». Voilà pour… l’ambassadeur.

Pour le pilote de chasse, on est plus près de la vérité puisque pendant la guerre d'Algérie il fut sous-lieutenant observateur dans une unité aérienne chargée de surveiller la frontière algéro-marocaine par laquelle se faisaient des infiltrations du FNL. Il ne pilotait donc pas (il observait) mais avait deux pilotes et leurs appareils sous ses ordres.

Maurice-Jean Calvet, un Saint-Victorien d'envergure

         La tentative de putsch en avril 1961 le fait immédiatement réagir. D’abord en paroles, ce qu’il décrit avec une étonnante minutie dans son récit. Entrant parfois en conflit avec des camarades officiers peu inclins à la rébellion ou carrément favorables au maintien de la domination française. Puis en actes puisque, dès l’appel du Général de Gaulle et son vibrant       « aidez-moi », il prépare le rapatriement de ses appareils vers la métropole. Le linguiste fait d'ailleurs une remarque inattendue à propos de la célèbre phrase du Général (« ce pouvoir a une apparence : un quarteron de généraux en retraite ») : « Nul doute que le mot « quarteron » utilisé pour la première fois dans cette acception, se révèle désormais chargé d’un sémantisme nouveau qui restera après de telles lettres de noblesse ! »

         Une traversée complète de la Méditerranée n’est pas envisageable pour ses « broussards », des avions très maniables et robustes, devenus légendaires, mais à l’autonomie limitée de 1200 km. Il opte donc pour aller demander asile à l’enclave britannique de Gibraltar. Il parvient à se procurer les cartes aériennes indispensables et décolle, apparemment sur un coup de tête, en fin de journée. De plus, un de ses pilotes, marié sur place, préfère ne pas le suivre et il lui faut donc piloter lui-même alors qu’il n’a pas encore terminé sa formation. 

         C’est là que la narration devient haletante : le commandement militaire envoie une patrouille à sa poursuite et il doit voler au ras des vagues et puis voilà  notre pilote débutant, simple appelé quoique officier, qui va devoir poser son avion sur un terrain réputé peu facile et en pleine nuit. Il se fait guider par le pilote du premier avion qui, dès que posé, se précipite dans la tour de contrôle. L’atterrissage est cahotique et se solde par la destruction d’une hélice mais l’apprenti pilote s’en tire à bon compte, est accueilli avec beaucoup de respect par la garnison britannique, peu de chaleur par le consul de France mais, par chance, beaucoup d’enthousiasme par une résidente française Compagnon de la Libération et proche de De Gaulle. C’est elle qui va le tirer d’affaire.

         Car en effet, son geste n’est ni plus ni moins qu’une désertion, surtout que le coup d’état fait long feu et qu’au bout de cinq jours tout est rentré dans l’ordre. Calvet a quelque peine à faire reconnaître que son geste était le plus indiqué mais sa protectrice lui permet d’échapper à une sanction et il quitte l’armée trois mois plus tard. 

 

 

* Thèse publiée ultérieurement sous le titre Le système phonétique et phonologique du parler provençal de Saint-Victor en Vivarais, dégagé sur la base de données instrumentales.

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Écho des Trois Clochers n°44, ou 33è épisode de la Chronique de Montpoulet.

Publié le par Prince Bernard

L'Écho des Trois Clochers est un des périodiques du village français à la frontière de Montpoulet. Il contient ce 33é épisode de La Chronique de Montpoulet. L'épisode reprend quelques articles déjà publiés ici de façon disparate. Les voici ici réunis avec davantage de photos.

33è épisode : L'affriolant frôlement des frelons.

Résumé des épisodes précédents : Françoise et Bernard ont racheté en 1994 la ferme totalement en ruines de l’arrière-grand-père de Bernard, à Montpoulet, Saint Victor. Ils viennent d’abord y passer leurs vacances et défrichent. Ils retrouvent la source, une faune fabuleuse, des voisins hospitaliers tandis que la configuration cabalistique des fondations les fait espérer un trésor. Ils viennent s’installer dans une caravane en 1997. Leur permis de construire est accepté après trois refus, et les travaux vont bon train malgré l’amateurisme de ces néo-ruraux. Après avoir retourné son tracteur trois fois, Bernard fait écrouler toute une façade, deux pins douglas manquent tout juste lui coûter la vie, et leur petit poulailler est régulièrement razzié par renards, rapaces ou fouines (voyez les numéros précédents de l'Écho des Trois Clochers, ou bien http://www.magnouloux.fr). Et dans la série Nos amies les bêtes, d'autres animaux leur créent des soucis :

 

        Les frelons par exemple. Après plusieurs nids dans des murs, invisibles, nous en avons eu deux en en plein air de toute beauté. En effet les frelons sont des artistes. Il ne sont pas agressifs, c'est juste que, par comparaison avec les guêpes de terre qui attaquent tout ce qui bouge, et étant donné qu'un frelon est cinq fois plus gros qu'une guêpe, dont il se nourrit, soit dit au passage, on craint le pire. Le frelon est discret : Françoise est allée maintes fois près du premier nid, caché derrière un arbalétrier du planchat, sans les remarquer du tout, tellement le véritable artiste est discret. Mais quand ils ont commencé à venir butiner les lampes du Palais, il a bien fallu trouver leur repaire, collé aux voliges.

           En essayant de ne pas les déranger, nous sommes venus rendre hommage à leur talent d'architectes et de stylistes. Ne dirait-on pas une création d'Antonio Gaudi, le créateur de la Sagrada Familia de Barcelone ?

Écho des Trois Clochers n°44, ou 33è épisode de la Chronique de Montpoulet.
Écho des Trois Clochers n°44, ou 33è épisode de la Chronique de Montpoulet.
Écho des Trois Clochers n°44, ou 33è épisode de la Chronique de Montpoulet.

       Leur deuxième œuvre d'art, deux ans plus tard, apparut dans la caravane ; Françoise était venue changer les draps, elle a senti comme une odeur, elle a relevé la tête, ils étaient là, pacifiques, à quelques centimètres de son visage. Elle partie en courant. Nous sommes revenus à deux prendre les draps, ranger, photographier. Ils n'ont rien dit. Françoise leur a même le lendemain amené des admirateurs, des randonneurs australiens qui parcouraient le GR42. Ils ont beaucoup admiré...

Écho des Trois Clochers n°44, ou 33è épisode de la Chronique de Montpoulet.
Écho des Trois Clochers n°44, ou 33è épisode de la Chronique de Montpoulet.
Écho des Trois Clochers n°44, ou 33è épisode de la Chronique de Montpoulet.

          Et puis, deux semaines plus tard, j'ai voulu refaire des photos, le nid s'étant agrandi. Et j'ai commis l'erreur d'utiliser un flash. J'ai pris des notes : y'a dû y avoir malentendu. Au premier flash deux éclaireurs me sont venus dessus, j'ai reculé et puis je suis revenu faire une photo de plus près. Ils ont dû prendre l'objectif pour une arme puisqu'ils ont attaqué la main qui tenait l'appareil photo. Un quart d'heure plus tard, je me sens tout bizarre... J'ai des fourmillements sous la plante des pieds et à l'instant, sur le tracteur, j'ai cru que j'allais perdre connaissance, je voulais arrêter le tracteur et aller chercher un téléphone mais pas d'endroit pour se garer, j'ai continué, la nausée s'est finalement enfuie...

 

           La guerre était déclarée. Nous avons pourtant essayé de garder la tête froide : c'était juste le flash ; ils ont cru à une attaque. Une sorte de méprise. On va pas se battre sur un quiproquo quand même ! Non, mais ce qui nous a décidé à passer à l'offensive, ce sont les immondices qui s'amoncelaient sous le nid (pas plus d'Assainissement Non Collectif que de tout-à-l'égout chez la gent frelon) et l'odeur pestilentielle qui en résultait. Françoise a revêtu son armure de chevalier blanc et, deux rafales d'insecticide plus tard, les frelons avaient vécu :

Écho des Trois Clochers n°44, ou 33è épisode de la Chronique de Montpoulet.
Écho des Trois Clochers n°44, ou 33è épisode de la Chronique de Montpoulet.
Écho des Trois Clochers n°44, ou 33è épisode de la Chronique de Montpoulet.

Nos (pas tant) amies les bêtes (que ça), bis :

       Ils ont attaqué à l’aube comme il se doit. Ils étaient deux, l’un rabattait, l’autre abattait. Méthodiquement et sans perdre de temps. Sans même celui de la jouissance et de la réflexion. En vrais professionnels. Sans le moindre sentiment. La neige amortissait tous les bruits. Les naines leur ont échappé, grâce à leur pouvoir de voler, mais pas les pondeuses, ni le maître.

Écho des Trois Clochers n°44, ou 33è épisode de la Chronique de Montpoulet.
Écho des Trois Clochers n°44, ou 33è épisode de la Chronique de Montpoulet.

         Pour garder l’un des deux assaillants prisonnier, le cousin Roger a condamné la porte avec un piquet de tente. Mais la porte a été défoncée et le prisonnier a disparu. J'ai le piquet en main quand je commence à suivre les traces. Intelligentes, les traces, faites pour perdre les poursuivants, avec de nombreux aller-retour. En passant devant le calabert, j’ai une idée. Trois coups de meuleuse et mon piquet devient lance ; alors quand je repars sur les traces de la Bête, je suis Lancier du Bengale à l’assaut de la frontière du nord-ouest, je suis la Cavalerie Fédérale sur les traces des voleurs de chevaux, Calamity Jane et Heraklès en un mélange d’attendrissement féminin (quand même, c’est qu’une bête, c’est pas sa faute, elle avait faim...) et d’inflexibilité vengeresse (Monsieur, si c’étaient mes poules qui étaient venues chez vous, défoncer la porte et tuer votre mastard, n'auriez-vous pas essayé d’empêcher ma volaille de nuire encore ? Et je vous interdis de rire !)

         Et puis, hein, marre d’être fonctionnaire et d’être protégé de toutes parts, encadré sous tous les angles, assuré contre vents et marées. Envie de revenir à l’âge de pierre, envie de faire mentir l’évolution selon Darwin, envie d’en découdre avec la vie, même au péril de la sienne…

 

           L’attaque c’était donc vendredi matin, une des deux bêtes, le (chien) loup s’est échappé à l’arrivée de Roger et de Françoise, l’autre fut donc barricadé à l’intérieur. Furieux, il cherchait à sauter par-dessus la grille mais se heurtait au filet anti-rapaces ; debout, il l’atteignait, à 1,80m ! Françoise a appelé la gendarmerie. L’affaire leur paraissant de la plus haute importance, ils annoncèrent qu’ils venaient tout de suite puis, une demi-heure plus tard, que la neige les empêchait de monter. L’armée française n’a pas pu atteindre Montpoulet ! (J'ai pris des notes : en cas de guerre avec la France, attaquer en hiver). Ils conseillèrent d’appeler le maire. Celui-ci conseilla soit d’abattre la bête soit de porter plainte à la gendarmerie.

           C’est ce que je fais le samedi matin, après avoir perdu la trace dans la neige. La gendarmette qui prend ma déposition confirme qu’ici, l’armée française traite d’affaires de la plus haute importance stratégique. Sa première déposition, me confie-t-elle alors que je m’excuse de la déranger pour si peu, les dommages étant estimés à… 30 ou 35 €, sans compter c'est vrai le préjudice moral des œufs tout chauds et du cocorico disparus, concernait une plainte contre un coq tonitruant le matin tôt.

            Les gendarmes ont bien mené une enquête, nous en avons eu des échos, mais les chiens errants n'ont jamais été retrouvés. Je suis par ailleurs toujours fonctionnaire et Montpoulet n'a pas encore attaqué la France.

On pourrait croire, à lire ces derniers épisodes que nos Amies les Bêtes aient été à Montpoulet nos ennemies. Mais heureusement il y eut aussi les aigles mangeurs de serpents. Des aigles à Montpoulet ? Allons donc ! Et bien si, et je le prouverai au prochain numéro de l'Écho des Trois Clochers.

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La défense sournoise du pin sylvestre qu’on abat.

Publié le par Prince Bernard

 

J’ai déjà raconté comment à Montpoulet les arbres savent se défendre lorsque je cherche à les abattre, comment un pin douglas m’avait cloué sur une planche ; comment un autre m’avait envoyé à l’hôpital avec un pneumothorax et comment je m’étais planté la tronçonneuse dans le mollet en voulant débiter un troisième. Mon voisin Maurice résume tout cela en un sibilin « Le bois, c’est traître ! ». Dernier exemple en date : le pin sylvestre qui menaçait nos lignes d’approvisionnement en électricité et téléphone. Déjà une de ses branches, en se détachant, avait failli couper le fil du téléphone et tordu la cornière qui l’attache au poteau.

 

La défense sournoise du pin sylvestre qu’on abat.

Quand la nature s’attaque à votre connexion internet, on ne peut que contr’attaquer, non ? Seulement voilà, un pin sylvestre, cela vous a souvent une sorte de coiffe, des branches en parapluie au sommet (comme celui qui avait accueilli le nid de circaètes ) qui empêchent le tronc de se coucher complètement. Il faut alors tronçonner des branches qui sont en tension et qui risquent de vous éclater à la figure en provoquant le basculement de tout l’arbre sur vous.

La défense sournoise du pin sylvestre qu’on abat.

J’avais pour celui-ci consciencieusement évité tous les pièges quand je m’attaquai à une dernière branche de moins de dix centimètres de diamètre mais dont je ne voyais pas qu’elle était plantée dans le sol. Et c'est bien là que se nichait toute la sournoiserie du pin sylvestre. Crac, la blessure du bois se referma sur le guide-chaîne et ne voulut pas le relâcher. Dans un dernier sursaut, l’arbre me confisquait ma tronçonneuse !!!

Je me débattis en tordant mon engin dans tous les sens pour le dégager. Rien à faire, il fallait négocier… Finalement, j’obtins, en démontant la machine, de reprendre le bloc moteur, puis le guide-chaîne. Le pin sylvestre gardait la chaîne en otage.

Bon, je l’avais bien eu, finalement, parce-que, hé hé… j’avais une deuxième chaîne.

La défense sournoise du pin sylvestre qu’on abat.
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