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Les envahisseuses, suite

Publié le par Prince Bernard

             Le buis est l’olivier de nos montagnes. Son bois au grain très fin permet les sculptures les plus délicates et les plus résistantes à la fois. On en fabrique par exemple un petit outil pour  fendre les tiges d'osier dans la fabrication des paniers. Dans la tradition catholique, pour la fête dite des Rameaux, on fait bénir des rameaux d’olivier partout dans les basses terres, mais ce sont des rameaux de buis que l’on fait bénir ici. Pas une maison sans un buis à portée de main. Nous en avons trouvé deux très gros à notre arrivée à Montpoulet, avec des troncs de 15 et de 18 cm de diamètre, ce qui serait un maximum possible et indiquerait un âge approchant les 150 ans. 

          Il y a de nombreuses variétés de buis, principalement dans les régions chaudes du globe et très peu résistent au gel, mais c’est le cas du buis de chez nous, le buxus sempervirens. Il résiste au gel mais pas à l’invasive orientale : la chenille de la Pyrale du buis, ou diaphana perspectalis (ce que je me risquerai bien imprudemment à traduire par « laisse voir à travers ceux qui cherchent à voir à travers »)

Les envahisseuses, suiteLes envahisseuses, suite

         Dans la vallée du Rhône le mal est fait. Le Dauphiné a rapporté des maisons où l’on ne peut plus allumer de lampes dans attirer des milliers de ces papillons blancs aux liserés gris ; des conducteurs qui, sur l’autoroute, doivent réduire leur vitesse puis s’arrêter pour nettoyer leurs pare-brise. Le long de la voie verte Berges de l’Isère tous les buis, sauvages ou pas, ressemblent à de grands fantômes jaunâtres, encombrés de déjections et de fils de soie, comme des toiles d’araignées sales.
 

Les envahisseuses, suite
Les envahisseuses, suite

         Les grands parcs, les châteaux qui pratiquent l’art topiaire, sont aux abois. Peut-on imaginer le jardin du Luxembourg, les parcs de Versailles ou de Vaux le Vicomte, le labyrinthe de Merville, la Principauté de Montpoulet sans leurs buis centenaires ?
         Peut-on lutter ? Oui, pense Marc Mennessier dans un article du Figaro de juin 2016. Il y eut une première période de panique où l’on devait hésiter entre d’un côté un produit réputé biologique, le Bacille de Thuringe, difficile d’emploi et finalement peu efficace, et de l’autre côté un insecticide à base de diflubenzuron, à l’action choc. Ce dernier est sans danger pour la faune auxiliaire mais son image souffre de la campagne de dénigrement des pesticides menée par certains groupes d’intérêt. Un plus grand espoir naît maintenant des recherches de l’INRA qui propose des pièges à phéromones qui capturent les mâles avant qu’ils puissent féconder les femelles. Inconvénient, il faut 6 pièges à l’hectare, à 18€ le piège dont il faut renouveler les phéromones toutes les huit semaines, à 4,5€ la recharge. Un espoir bien coûteux donc.
     Une autre solution serait l’introduction de petites mouches, que l’Inra est en train de sélectionner, capables de s’attaquer aux œufs. Mais ne risquerait-on pas d’aller de Charybde en Scylla avec un autre parasite dont on ne pourrait pas se débarrasser, à l’instar des coccinelles asiatiques qu’on a introduites en agriculture bio pour lutter contre les pucerons et qu’on associe maintenant à une infestation monstrueuse qui non seulement envahit les maisons de façon déplaisante mais contribue à la disparition des coccinelles indigènes.
      Alors faut-il se résigner et penser, comme nombre de spécialistes, que la seule chose qui viendra à bout de la pyrale du buis, ce serait... la disparition totale du buis ?

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No-fly zone over Mountchicken

Publié le par Prince Bernard

Principauté de Montpoulet,

Montpoulet, Chemin de Montpoulet, etc.

 

Prince Bernard-Régis, Commandeur de l’ordre de la Salamandre Écarlate, Chevalier Servant de la Bicyclette et des  Palmes Académiques.

Cabinet du Prince le 11 décembre, an 16 de l’Agirvitébien.

 

à

 

Monsieur le Général de Brigade Aérienne Éric AXXXXXX, commandant la  Base Aérienne, 701 de Salon de Provence, Chemin Saint Jean, 13661 Salon de Provence

 
 
 

Voilà bientôt vingt ans que nous habitons la Principauté. À notre arrivée en provenance d’un village près de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle, nous nous sommes de suite étonnés d’entendre les avions beaucoup plus que là-bas. Nous avons donc décidé d’interdire le survol aux trop bruyants d’entre eux. La pancarte fut placée face au ciel dans un endroit dégagé non recouvert de végétation.

 
Cela n’a strictement rien changé. On nous a dit que comme nous étions sur un point géodésique, vos pilotes le prenaient pour repère. On nous a même dit que certains, plus malins que les autres, avaient fait le pari de se glisser entre nos deux corps de bâtiments.

Nous reconnaissons que la pancarte est petite mais les trois pastilles de bronze du point géodésique, enchâssées dans les rochers, ne font pas plus de deux cm de diamètre et les pilotes s’en servent bien… mais voilà pourquoi je vous écris. Je précise que si les aéronefs dépassant les 50 km/h sont indésirables (nous n’avons rien contre les Montgolfières qui, malgré la sorte de rugissement qu’elles émettent lorsque le brûleur est en marche, restent compatibles avec notre sérénissime domaine) nous n’aurions rien, réflexion faite, contre un aéronef plus rapide mais dont le moteur serait silencieux. On rend bien les pistolets silencieux, pourquoi pas les Mirages et les  Rafales ?

Rien de tel, vous en conviendrez, que le tonnerre d’un avion chasse, tellement soudain, tellement démesuré,  pour nous faire perdre la raison. Puisqu'il nous en reste encore un peu, nous vous serions reconnaissants de l’épargner.

 

Je vous prie d'agréer, mon général, l'expression de ma sereine et respectueuse considération.

No-fly zone over Mountchicken

Général de Brigade Aérienne Éric AXXX, Officier de la Légion d’Honneur, Base Aérienne 701 de Salon de Provence, Chemin Saint Jean, 13661 Salon de Provence.

À

Prince de Montpoulet, Montpoulet, Chemin de Montpoulet, etc.

 
Monseigneur,

Votre courrier a retenu toute notre attention et, soucieux de ne pas assombrir les relations de voisinage avec votre excellence, nous avons demandé à nos pilotes, lorsqu’ils sont en approche de Montpoulet, de couper leurs réacteurs pendant le dernier kilomètre, afin de survoler la Principauté en vol plané et de ne remettre les gaz qu’une fois la crête de montagne dépassée. Cela ne supprimera pas toutes les nuisances, nous en sommes conscients, mais vous comprendrez aisément qu’un survol plus long sans réacteur pourrait avoir des conséquences fâcheuses pour les mitrons des cheminées de vos palais.

N’hésitez pas à nous faire part de vos remarques à ce sujet. Nos services sont tout entiers à votre écoute.

Je vous prie d'agréer... etc.

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L'agrégation des minces langues occidentales

Publié le par Prince Bernard

J’ai la réponse à la question que je posais il y a quinze jours : non, le réduve masqué n’est pas l’allié du calosome sycophante dans sa lutte contre les chenilles processionnaires du pin ; non, il n’en est pas non plus l’éboueur. (Au fait, l'imago des processionnaires est un papillon de nuit sans trompe, sans goût ni couleur, qui vit quelques jours seulement sans se nourrir. Il fait partie de la famille des notodontes, ce qui doit signifier, puisque mastodonte veut dire dents en forme de sein, qu'il a, à défaut de trompe, des dents en forme de dos, CQFD. Son petit nom est thaumetopoea pityocampa, ce qui signifie, quand on comprend le grec, ce qui n'est pas mon cas, faiseur de merveilles et campeur qui fait pitié. Je plaisante. Et je lance un appel aux hellénistes).

 

Non, ce que j’ai trouvé dans le cocon de chenilles processionnaires, en train de se régaler, non pas des chenilles mais de petites billes de je ne sais quoi, mais qui ressemble à de la résine de pin, c’est en réalité le réduve américain, ou la punaise du pin, justement. Un invasif, une sorte de migrant, un sans-papier, qui ne figure donc pas dans mon livre (réputé) sur les insectes européens. D’où mon erreur. Et cette punaise n’est pas carnivore (insectivore, plus précisément) mais végétarienne, comme les Américains à la mode. Elle n’a pas de rostre avec lequel elle risque bien de vous piquer pour vous inoculer on ne sait quoi encore, mais une sorte de trompe très allongée et souple, d'où son petit nom Leptoglossus Occidentalis, encore du grec : langue mince d'occident.

 

Si l'on ne trouvait de ces punaises américaines que dans les nids de chenilles ou à la rigueur dans les pins, tout irait bien, mais comme sa cousine migrante la coccinelle chinoise, dont je vous dirai deux mots tantôt, elles ont tendance, quand la bise fut venue, à se réfugier dans les maisons. Et quand l'une d'entre elle a trouvé son squat confortable, elle émet des phéromones très particulières, dites d'agrégation, oui, comme le concours des enseignants, et on assiste à un regroupement familial massif. Montpoulet en sait quelque chose, nous en trouvons cinq par jour.

 
L'agrégation des minces langues occidentales
L'agrégation des minces langues occidentales
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