10- Rackettés par des policiers tchèques

Publié le par BMx

                                   

       Très content de son passage à Saint-Victor, et très heureux de la satisfaction affichée par ses clients d’avoir été chaleureusement reçus, Dalibor concrétise l’année suivante, en 1997, la promesse de nous faire venir en République Tchèque. Cela va être un séjour mémorable et notamment pour l’accident de Françoise qui sera la cause de notre déménagement pour Saint Victor.

            Dalibor a vu grand. D’abord une tournée de conférences sur nos voyages à vélo à Brno, là où il demeure, et, la deuxième semaine de nos vacances de Pâques, une tournée à Prague. Notre voiture est donc bien chargée avec tout le matériel de projection et nos deux vélos-couchés sur la galerie. C’est que Dalibor veut absolument, de surcroît, nous faire pédaler pour attirer des clients à sa boutique de cycles.

            Le voyage est long, nous dormons une nuit en Allemagne, parcourons un bout d’Autriche et débarquons au centre de Brno où nous téléphonons à Iana, la blonde interprète. Elle nous emmène chez elle, un ensemble d’immeubles gris très représentatifs de l’idée que nous nous faisons de l’Europe de l’est. Comme il n’est pas question de laisser du matériel dans la voiture, il nous faut tout transporter dans l’appartement, les vélos comme les projecteurs. L’appartement est confortable mais très vite empli par nos affaires. Les deux filles de Iana nous laissent leur chambre. Dalibor nous rejoint, il n’habite plus avec son épouse bien que sa boutique de cycles soit toujours dans la maison familiale, une villa cossue où nous irons rencontrer les membres du club cycliste.

            La première conférence est prévue au théâtre principal de la ville dès le lendemain soir. C’est Dalibor qui se chargera du matériel pendant la journée tandis que Françoise et moi irons visiter, c’est absolument obligatoire, à vélo, un haut lieu de l’histoire commune entre la France et la république Tchèque. Et qui est ? Je vous le donne en mille, une victoire napoléonienne très célèbre, qui a donné son nom à une gare parisienne, vous y êtes ? Mais oui, Austerlitz !

             Iana et Dalibor ont tout prévu. Tout d’abord un parcours en train, pour que l’aller-retour soit possible dans la journée. A côté de nous dans le compartiment un homme emporte un joli morceau de buis qu’il va sculpter. Cela me fait penser aux buis de Montpoulet. Il y en a deux très gros, il paraît qu’ils ont plus de trois cents ans.

            Ce que nos hôtes n’avaient pas prévu, c’est le fort vent de face qui nous fait arriver assez tard à Austerlitz. Une fois la visite terminée, il faut revenir le plus vite possible mais sans le train. A l’approche de Brno, la route devient interdite aux cycles et nous devons suivre un itinéraire accidenté qui nous retarde encore. Aussi, lorsque nous repassons par dessus l’autoroute directe pour le centre-ville, je décide de tenter le coup.

Cela revient à tenter le diable. Une voiture de police est stationnée à l’endroit même où la bretelle d’accès rejoint la chaussée. Cela me rassure pourtant : ou bien les policiers nous font une fleur, eut égard à notre nationalité et à nos vélos bizarres, ou bien ils refusent et nous faisons demi-tour sans avoir vraiment enfreint la loi ni perdu de temps.

            Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que je me retrouverais à vélo sur une autoroute. La première fois c’était il y a longtemps. Je passais par Genève avec mon frère, j’avais 16 ans et lui 14. Nous aperçûmes un panneau pour Lausanne où nous allions. Surmonté d’un autre panneau représentant une voiture sur fond bleu (voie rapide). Sans blague, nous n’en avions jamais vu !. Le policier qui nous a arrêtés deux km plus loin n’a pas voulu nous croire, mais, bon prince, n’a retenu que nos noms au cas où nous recommencerions. Presque vingt ans plus tard, déjà en retard pour une conférence dans la banlieue sud de San Francisco, j’empruntai en pleine nuit l’autoroute qui amène au Golden Gate bridge. Elle semblait déserte. Et puis je venais de traverser presque tout le Nevada en suivant une autoroute en parfaite légalité. C’est le haut-parleur d’une voiture de police qui m’a démontré que cela ne l’était plus. Il fallait que je déguerpisse à la première sortie. Mais pas plus.

            D’où ma stupéfaction quand le policier tchèque, après nous avoir obligeamment fait asseoir dans son fourgon et après avoir contrôlé nos passeports, nous réclame en anglais, cent dollars américains d’amende pour avoir roulé à vélo sur l’autoroute. Cent dollars chacun. Ouille. Voilà ce que Dalibor et Iana n’ont pas prévu non plus. La conférence est dans moins d’une heure et nous voilà confrontés à un flic véreux qui croit avoir trouvé des pigeons occidentaux à plumer. Comment faire ? Payer sans protester et encourager la corruption ? Ou bien négocier longuement et compromettre notre rendez-vous ?

            Et bien je vous dirai mon choix dans le prochain épisode. Quoi, je vous ai déjà promis l’accident de Françoise ? Et bien, la prochaine fois, vous aurez deux dénouements pour le prix d’un !

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