Nos chattes, un exemple de dignité humaine.
(Les âmes sensibles n’iront pas jusqu’aux images et ne feront que lire ce qui suit, c'est-à-dire sans doute un manifeste politique, rien moins ;-D)
Elles avaient été opérées la veille, par un ami cycliste incidemment vétérinaire, sur la table de la cuisine, instruments stérilisés à l’eau de vie de poire (la meilleure), l’une, Patchouk, d’une ovariectomie, et l’autre, Pataki, d’une ovaro-hystérectomie, bref stérilisées après rasage, incision de la peau, découpage des abdominaux, extraction des boyaux et j’en passe. Elles avaient récupéré toute la nuit dans la salle de bain, comme des zombies, en proie à toutes les hallucinations (le copain précise que l’anesthésique vaut à sa profession d’être cambriolée, tant l’effet hallucinogène est goûté par les spécialistes). Nous étions allés vérifier que tout allait bien, avions abondamment commenté qu’elles aient, dans leur chambre de réveil improvisée mais dûment carrelée, interverti les cartons qui leur servaient de lits médicalisés et Françoise avait décidé qu’il fallait, maintenant que la salle de bain sentait le fauve, les installer au salon. Mais dès qu’elles ont vu la lumière, dès que leurs rétines ont imprimé le vert de la forêt, dès que leurs tympans ont capté le chant du coq, dès qu’elles ont compris que la liberté ne tenait qu’à une vitre, nos vaillantes chattes ont voulu sortir.
Pas question d’appeler le 115 ou le 911, pas question de gémir et d’emmerder le monde avec ses états d’âme, pas question de demander une dose de morphine ou une péridurale, pas question de se faire offrir une cure thermale par la sécu, suivie de huit jours d’arrêt maladie parce que « c’est bien connu la cure ça fatigue », ou de se faire prescrire une pile de sédatifs par le premier médecin vénal venu, pas question d’aller pleurer chez Brigitte Bardot, le MRAP ou les spécistes, pas question de réunir toute la famille bêlante à son chevet, pas question de réclamer un seul millionième de placebo dilué… non, juste aller d’un pas hésitant se terrer dans un trou et attendre que la douleur passe, mordre dans la pipe sans laisser une seule plainte s’échapper…
mourir s’il le faut mais rester digne.
après rasage
incision de la peau, découpage des abdominaux
extraction des boyaux et j’en passe
en proie à toutes les hallucinations